« Je promets aux Français un regard lucide » réécoutez Édouard Philippe sur France Inter le 4 juin 2025
Sur Le prix de nos mensonges :
Édouard Philippe l’a écrit parce qu’il était en colère. Une colère froide, intense, qui vient du constat qu’on ne regarde pas suffisamment la réalité en face dans notre débat public. On voit la réalité telle qu’on préférerait qu’elle soit et non pas en s’appuyant sur les faits. La différence entre la réalité et ce que nous disons est préoccupante et nous interdit de prendre les bonnes décisions pour le pays.
Ce n’est pas un livre accusatoire écrit pour pointer du doigt. C’est un livre sur les mensonges que nous nous racontons collectivement à nous-mêmes. Dans notre pays, on parle de récits, on éditorialise, mais on ne part plus des faits. Avec Le prix de nos mensonges, Édouard Philippe a voulu repartir des faits pour aborder quelques domaines importants, dont la démographie. La démographie détermine assez largement notre destin et nous ne tirons pas les conséquences de ce qui se passe sous nos yeux. Nous devons, sur ce sujet comme sur tous les autres, repartir des faits, du réel, pour transformer le pays.
Bien sûr, il y a aussi des choses qui vont bien en France. En particulier, selon Édouard Philippe, nous avons, en France, une capacité de rebond exceptionnelle. Il parcourt le pays et il rencontre des femmes et des hommes exceptionnels, découvre des pépites et constate partout cette capacité de rebond. Mais, pour rebondir, il faut regarder la réalité en face, sans se raconter d’histoires.
Sur l’immobilisme de ces cinq dernières années :
Selon Édouard Philippe, Emmanuel Macron, comme Nicolas Sarkozy avant lui avec la crise de 2008, a vu l’élan réformateur des trois premières années stoppé net en 2020, à cause de la première phase de la crise du Covid. Et puis, en 2022, le programme présidentiel manquait d’audace et la majorité parlementaire n’était pas claire. Depuis 2024, nous sommes en situation d’absence complète de majorité. Aujourd’hui, Édouard Philippe déplore que cette absence de majorité interdit de fait les grandes réformes dont le pays aurait besoin. Il y a quelques initiatives législatives, mais aucun grand projet. Personne en France ne pense aujourd’hui qu’on est en train de préparer l’avenir avec la majorité actuelle.
Sur les modèles d’Édouard Philippe :
Édouard Philippe constate que Margaret Thatcher et Gerhard Schröder, avec des styles différents, ont tous les deux transformé leurs pays respectifs qui étaient alors confrontés à de vraies problématiques. Ils ont réussi parce qu’ils ont été lucides, ont affirmé clairement les choses et ont entrepris des réformes de structure courageuses. En France, il faudra faire de même si on veut transformer le pays.
Sur les retraites :
Pour Édouard Philippe, la France est en train d’entrer dans un piège démographique à cause du vieillissement d’une part et de la dénatalité d’autre part. On est donc dans une situation où nous ne renouvelons pas les générations. Dans la France d’aujourd’hui, il y a plus de personnes nées en 1946 que de personnes nées en 2024. Cela a une conséquence décisive sur notre système social, fondé sur l’idée que le travail finance la retraite de ceux qui ne travaillent plus. Le nombre des actifs est en train de considérablement se réduire, et donc ne peut plus pleinement prendre en charge les retraites.
Les pays confrontés avant la France à ce piège démographique ont tous mis en place les mêmes réformes : ils ont accepté de travailler plus longtemps pour sauver le système par répartition et ont mis en place un système de capitalisation pour le compléter. Édouard Philippe déplore le fait que tous ceux qui racontent qu’on peut baisser l’âge de départ à la retraite sont dans le déni du réel. Les exemples italien, allemand ou espagnol devraient leur ouvrir les yeux.
Sur l’immigration :
Édouard Philippe affirme que, si nous voulons faire face à la diminution de la population active, nous allons avoir besoin de populations étrangères. A vrai dire, c’est déjà le cas dans beaucoup de domaines. Dans la médecine, on a par exemple déjà beaucoup de médecins étrangers et personne ne s’en plaint. Nous aurons demain besoin d’aides-soignants, d’ingénieurs…
Ce n’est presque pas une question d’humanité pour Édouard Philippe. C’est un besoin pour la prospérité de la France, mais qui ne doit pas signifier pas qu’il n’y aura aucun contrôle, évidemment.
Sur les violences consécutives à la victoire du PSG en Coupe d’Europe :
Pour Édouard Philippe, l’idée qu’après un match de football, on s’expose à des morts et à des pillages, est choquante. Les forces de sécurité ont fait face à une situation très compliquée ce soir-là et la mobilisation policière, en termes de chiffres, paraissait adaptée à la situation à Paris. Dans beaucoup d’endroits en France, il n’y a d’ailleurs eu aucun problème significatif. Le ministre de l’Intérieur a probablement fait de son mieux et se rend compte aujourd’hui que la gestion du réel est terriblement difficile.
Nous n’avons pas, dans notre arsenal juridique, d’outils permettant de sanctionner efficacement les délits commis avec un fort sentiment d’impunité dans des situations comme celle-là. Le rappel à la loi ne suffit pas et Édouard Philippe a fait de nombreuses propositions pour renforcer cet arsenal lors de son dernier discours à Marseille. Le groupe Horizons & Indépendants à l’Assemblée nationale a d’ailleurs fait adopter une proposition de loi pour introduire des peines ultra-courtes en France en partant du principe qu’on enferme aujourd’hui trop tard et trop longtemps. La proposition doit faire son chemin parlementaire.
Sur le rapport sur les Frères musulmans et la proposition d’interdiction du voile pour les jeunes filles :
Édouard Philippe affirme qu’il est évidemment indispensable de lutter contre tout groupe sapant les fondements de la République, qu’il soit religieux ou politique. La dissolution est possible, mais interdire aux gens d’adhérer intellectuellement à cette idéologie est beaucoup plus compliqué.
Lorsque Édouard Philippe voit une jeune fille de 10 ans porter le voile, cela le choque parce qu’il y a là un choix identitaire imposé par les parents. Faut-il pour autant en faire une loi ? Prendrait-elle la forme de l’interdiction de l’ensemble des signes religieux dans l’espace public pour les moins de 15 ans ou se limiterait-elle au voile ? En réalité, aujourd’hui en France, on n’applique même pas correctement les règles existantes, comme l’interdiction du port du voile intégral.
L’essentiel, c’est le contre-discours, pas l’interdiction. Il faut que l’émancipation républicaine, l’Ecole, les services publics, fonctionnent. C’est un combat difficile que les maires mènent avec courage. Il est beaucoup plus important que des propositions de posture dont on ne sait pas si elles sont constitutionnelles et dont le but est d’occuper l’espace public.
Sur les municipales 2026 à Paris :
Édouard Philippe et son parti Horizons soutiennent Pierre-Yves Bournazel. Il le connaît et pense qu’il a toutes les qualités pour être maire de Paris. Il n’a pas simplement une ambition personnelle, il a une vision pour Paris, une constance dans l’engagement, une capacité à rassembler. Il fera un très bon maire de Paris.
Sur le bloc central dans la perspective de l’élection présidentielle 2027 :
Édouard Philippe ne croit pas qu’on puisse organiser une primaire dans un champ aussi large, allant des Républicains jusqu’à Renaissance. Les partis politiques ne sont même pas aujourd’hui capables de s’entendre sur des choses bien plus faciles que la désignation d’un candidat à l’élection présidentielle… Ils sont par exemple incapables de signer un contrat de coalition alors même qu’ils gouvernent ensemble…
Les électeurs choisiront. Aujourd’hui, Édouard Philippe est le seul à s’être déclaré candidat. Il ne le fait pas dans une logique partisane ou d’exclusion, mais en pensant à ce qu’il proposera aux Françaises et aux Français et en appelant de ses vœux la constitution d’un grand bloc central.